Un jeune de Stains a passé deux semaines en Algérie. L’occasion de redécouvrir son pays d’origine. Et d’apprécier à quel point la passion du football cache d’autres évolutions, plus profondes. Récit.

Nous quittons Paris en direction de Constantine. L’échappée débute avec un habituel retard d’Air Algérie. « Rien de plus normal », diront certains. « Les voyages sont faits d’aventures », souffleront d’autres.

Dans la file d’attente pour l’enregistrement des bagages résonne la mélodie de ce pays où se côtoient traditions et modernisme, barbus et jeunes gominés. A plusieurs reprises, des voisins nous martèlent que le pays change. Les visages des voyageurs aussi. Dans l’avion, nous apercevons des hommes d’affaires, français, chinois, australiens, espagnols… et d’autres horizons encore. Le business semble donc attractif aux pays des fennecs.

Fennecs ? C’est le surnom donné aux joueurs de l’équipe nationale de football. Les Algériens et le football : une passion, un amour, des joies et des peines. Après l’effervescence du mondial sud-africain, nous voulions rencontrer ce peuple fou de ballon rond.

Nous avons suivi le CS Constantine, club algérien fondé en 1898 et évoluant aujourd’hui en seconde division. Les jours de match, ses supporters, une marée humaine aux couleurs du club, envahissent la ville. Quand le CSC joue, son berceau semble respirer avec et pour lui. Les rues se parent de vert et noir. On chante, on danse pour annoncer une victoire prochaine. Les supporters affluent dans les rues, sur les boulevards et dans les buvettes aux alentours du stade. Une ambiance masculine, au sein de laquelle on refait les matchs passés. On évoque les anciennes gloires du club avec des étoiles plein les yeux. Mais pas seulement.

Le football serait-il devenu un espace d’expression ? La voix du stade nous apporte la réponse. On discute de toutes les sphères : sociale, économique et politique. « On vient au stade pour décompresser, pour oublier la misère du quotidien et pour dire ce que personne ne veut entendre… », nous explique Lailou, jeune supporter, entre deux insultes adressées à l’arbitre de la rencontre. Tipoo, un autre supporter, nous explique : « L’Algérie est un grand pays au sein duquel on a parfois du mal à trouver sa place. Nous n’avons pas de classe moyenne, il y a juste les riches et les autres. Ceux qui vivent en se débrouillant. Tu vois le minot aux cigarettes, en face de nous ? C’est son commerce ! C’est ainsi qu’il gagne sa croûte. » Un autre nous interpelle : « En Europe, c’est pareil, c’est toujours les mêmes qui mangent, on n’a pas de leçon à recevoir… »

Bien plus que sur le terrain, le spectacle se déroule dans les tribunes. Des policier sont présents dans les gradins, l’occasion de voir se dessiner sous nos yeux les rapports de la population civile à l’Etat. On se dévisage, on se menace du regard et le bâton à la main pour rappeler que la force est du coté de l’autorité. Mais le nombre rend fort. Au stade, les tabous tombent et les verrous de la société avec. On consomme de l’alcool, on fume des joints et on joue à chat et à la souris avec le policier, souvent las de ce petit jeu. En Europe, les championnats connaissent quelques  « classico » de type PSG/OM. En Algérie, tous les matches deviennent une rencontre au sommet. Parole de supporter.

R. H.

Club Sportif Constantine

Date de fondation : 1898

Surnom(s) : Sanafir

Autre nom : Club franco-musulman de Constantine

Couleurs : Vert et noir

Stade : Stade Chahid Hamlaoui (40 000 places)

 

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