Alors qu’il prenait des photos dans une rue de Dakar pendant le FSM, Khalid a été emmené au commissariat. Le jeune Reporter citoyen de Créteil raconte sa mésaventure.

Il est 13h. Alors que je suis dans une rue très vivante, je décide de prendre une photo montrant la diversité des moyens de locomotion : un bus, un cheval, des gens à pied et un taxi. Au moment où je vais photographier le taxi, un policier passe dans le cadre et le contrôle. Je fais un gros plan avec le policier de dos. Je commence à repartir avec le sourire quand un homme m’appelle et me signale de regarder derrière moi. Un policier s’approche de moi, l’homme fait signe au policier de m’arrêter.

Je regarde le policier dans les yeux et lui demande ce qu’il veut. « Tu m’as pris en photo et c’est interdit : donne-moi ton appareil, que je regarde ! ». Il se retourne vers l’homme et lui demande de confirmer qu’il m’a vu prendre une photo de lui. « Oui ,oui, monsieur l’agent : je l’ai vu, il a pris une photo de vous ». On se met à l’écart, il regarde mes photos : malheureusement, le cliché est trop sombre, on ne le reconnaît même pas ! Mais il insiste pour que je le suive au commissariat le plus proche.

Il me montre son scooter et me prie de monter derrière lui. « Je pourrais avoir un casque pour ma sécurité ? ». Il me répond sur un ton un peu agacé : « Je n’en ai pas. Allez, montez : je vais conduire prudemment ». Je monte derrière lui, et c’est parti pour cinq minutes de discutions en conduisant. « Vous savez, c’est réprimandé par la loi de prendre des photos des forces de l’ordre au Sénégal. Ici, c’est pas la France ».

Il traverse le terre-plein, roule en sens inverse et monte sur le rond-point pour s’arrêter devant le commissariat. Ou plutôt, non : il me prie de monter dans une voiturette à trois roues et de montrer les photos que j’ai prises à son chef. Le policier explique l’infraction commise en précisant qu’il va falloir payer si je veux pas aller au commissariat . « Mais je n’ai pas d’argent sur moi ! J’avoue que j’ai pris la photo d’un policier dans l’exercice de ses fonctions, en train de contrôler un taxi, mais je ne vois pas ce que j’ai fait de mal, sauf si vous avez quelque chose à vous reprocher ou à cacher ! ».

Son chef nous écoute et regarde mes photos pour contrôler que j’ai bien tout effacé. Puis il me demande : « Tu fais quoi dans la vie ? » J’explique que je suis ici avec un atelier qui donne la chance à des jeunes de pouvoir devenir reporters et que, cette semaine, on couvre le Forum social mondial à l’université : « Alors, croyez-moi : je ne suis pas là pour dire du mal du Sénégal, mais pour rêver à un monde meilleur pour l’Afrique ».

Il me regarde dans les yeux, me rend mon portable, me répond : « Vous savez, ce n’est peut-être pas votre cas, mais beaucoup de journalistes étrangers viennent pour dire du mal de nous. Alors maintenant, on fait très attention. Passez un bon séjour au Sénégal ! » Il se retourne et fixe d’un air sévère le policier qui m’a amené. Jusqu’à lui faire baisser les yeux.

Khalid Nahi

Pour plus d’informations,
contactez-nous !